La nature ondulatoire de la chaleur modifie sa propagation

Résultat scientifique Photonique

Tout comme la lumière et le son, la chaleur possède une nature ondulatoire, dont l’influence réelle reste pourtant mal connue. Des chercheurs de l'unité mixte internationale LIMMS et de l’université de Tokyo ont pour la première fois utilisé sa nature ondulatoire pour modifier la vitesse de propagation de la chaleur. Ils ont pour cela employé des membranes de silicium perforées de différentes manières, soumises à de très basses températures. Ces travaux sont publiés dans Science Advances.

À l’échelle du nanomètre, la chaleur est représentée par les vibrations des atomes. Ces excitations collectives, appelées phonons, forment des paquets d’onde modélisés comme des quasi-particules. Ils se propagent en ligne droite sur de petites distances, puis se diffusent lorsqu’ils rencontrent un obstacle. Leur longueur de cohérence, soit la distance sur laquelle l’onde reste cohérente, est si faible que le comportement ondulatoire des phonons n’avait jamais eu d’effet observé sur le transport de la chaleur à température ambiante. Des chercheurs du Laboratory for integrated micro mechatronics systems (LIMMS) et de l’Université de Tokyo viennent cependant de démontrer que ces ondes ont bien un impact.


Ils se sont servis de membranes de silicium de 145 nanomètres d’épaisseur, perforées de réseaux de trous. Si les trous sont bien réguliers et alignés, des interférences doivent en théorie apparaître et ralentir la propagation de la chaleur. Les chercheurs ont refroidi le système en dessous de 10 kelvins, ce qui allonge la distance de cohérence des phonons et augmente leur longueur d’onde pour mieux interférer avec le réseau de trous. Cela atténue les phénomènes capables de perturber l’expérience. Les scientifiques ont alors constaté qu’effectivement, la chaleur se propageait plus rapidement au sein des réseaux désordonnés, avec une différence de vitesse qui atteint jusqu’à 20 % à 4 kelvins. Les interférences, et donc la nature ondulatoire des phonons, ont bien un impact fort sur le transport thermique. Ces travaux pourraient trouver des applications en nanotechnologies et en microélectronique : le manque de dissipation de la chaleur est en effet un obstacle majeur à la miniaturisation, tandis que sa conversion en énergie électrique permettrait d’alimenter de nombreux composants.

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© LIMMS

Images en microscopie électronique d’une structure ordonnée (a) et désordonnée (b). c) Schéma de la structure globale. d) mesures expérimentales de la vitesse de dissipation thermique en fonction du désordre.

Références :

Heat conduction tuning by wave nature of phonons. 
J. Maire, R. Anufriev, R. Yanagisawa, A. Ramiere, S. Volz, M. Nomur
Science Advances. 3, e1700027 (2017).
DOI : 10.1126/sciadv.1700027

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Communication CNRS Ingénierie
Jérémie Maire
Chercheur