Un dispositif microfluidique pour élucider la migration des macrophages

Résultat scientifique Bioingénierie

Les macrophages, cellules du système immunitaire, se déplacent de manière autonome dans les tissus. Des chercheur·e·s du LAAS-CNRS, en collaboration avec l'Institut de pharmacologie et de biologie structurale, ont conçu un système microfluidique qui permet de mesurer les forces exercées par un macrophage sur son environnement pendant sa migration. L'étude, qui révèle un mécanisme de migration original en milieu confiné, est publiée dans la revue Nano Letters.

Lorsque les macrophages, cellules du système immunitaire, se déplacent dans un tissu, ils se propulsent en exerçant des forces mécaniques sur les obstacles qu'ils rencontrent : les structures de la matrice extra-cellulaire et les autres cellules du tissu. Pour mieux comprendre ce mécanisme, une équipe du LAAS-CNRS et de l'Institut de pharmacologie et de biologie structurale (IPBS, CNRS/Université de Toulouse) a créé un dispositif microfluidique qui permet d'observer la migration d'un macrophage dans un canal de quelques microns de large, figurant in vitro le milieu naturel confiné dans lequel se déplace la cellule in vivo.

Les chercheur·e·s sont allés plus loin : ils ont ajouté dans le dispositif microfluidique des capteurs capables de mesurer les nanoforces exercées par les cellules pendant leur locomotion. Par un procédé dédié de photolithographie et de gravure sèche, ils ont fabriqué à l’échelle micrométrique, des piliers de rigidité contrôlée qui forment des obstacles à la progression des cellules au sein de ces micro-canaux. En observant la migration des macrophages par vidéomicroscopie, et en mesurant la flexion des micro-piliers, ils en ont déduit l'amplitude des forces - de l'ordre de 300 piconewtons (300.10-12 newton) - exercées par la cellule pour se mouvoir. Ils ont aussi déterminé, et c'est un résultat remarquable de l'étude, la direction des forces exercées. En effet, les chercheurs ont mis en évidence que le macrophage, lorsque son environnement est de plus en plus confiné, adapte son processus de locomotion : au lieu de tirer, il pousse sur son environnement, et se déplace par un processus de friction.

Ces résultats ouvrent la voie à une meilleure compréhension de la migration des macrophages dans des contextes pathologiques (tumeur, inflammation), et du rôle néfaste qu'ils peuvent jouer dans l'évolution de la maladie. Dans une prochaine étape, les chercheurs vont réaliser le même type d’expérience, cette fois dans un dispositif réalisé par micro-impression 3D, plus représentatif de l'environnement rencontré par les macrophages dans un tissu.

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© LAAS-CNRS
À gauche un micro-canal de 6 microns équipé de piliers cylindriques est observé au microscope électronique. Au centre un macrophage humain figé durant sa migration est observé en microscopie électronique au sein de ce canal et au contact des piliers déformables. En haut à droite un macrophage étiré dans ce canal et en interaction mécanique avec trois piliers est observé de dessus en microscopie optique à fluorescence. En bas à droite le schéma indique l’orientation typique des forces mécaniques de la cellule sur les trois piliers au cours d’une séquence de migration et la position du noyau de la cellule déformé par un des piliers.

Références :

Nanoscale Forces during Confined Cell Migration,
E. Desvignes, A. Bouissou, A. Laborde, T. Mangeat, A. Proag, C. Vieu, C. Thibault, I. Maridonneau-Parini, and R. Poincloux.
Nano Letters 2018, 18 (10), pp 6326–6333
DOI: 10.1021/acs.nanolett.8b02611

 

 

Contact

Communication CNRS Ingénierie
David Pech
Laboratoire d'analyse et d'architecture des systèmes du CNRS (LAAS-CNRS)