Un nouveau modèle pour prédire la fonte des glaces en Antarctique

Résultat scientifique Mécanique des fluides

Les grandes plaques de glace qui descendent de l’Antarctique à l’océan s’érodent au contact de courants océaniques sous-jacents, cachés à l’observation. Une équipe internationale a mené des expériences avec la cuve tournante Coriolis du Laboratoire des écoulements géophysiques et industriels pour reproduire le phénomène. Selon ses résultats publiés dans Nature, les différences de densité de l’eau de mer font que certains courants passent sous la glace et accélèrent sa fonte.

La calotte glaciaire antarctique s’amenuise de façon accélérée, contribuant à la montée générale du niveau de la mer. Cette réduction résulte d’un écoulement glaciaire, favorisé par la réduction des « iceshelves ». Ces immenses plaques de glaces proviennent des glaciers terrestres, flottent sur l’océan et se terminent en hautes falaises. Elles ne doivent pas être confondues avec la banquise, qui est issue du gel de l’eau de mer. À cause de leur épaisseur d’environ un kilomètre, les « iceshelves » masquent les mécanismes qui ont lieu en profondeur. Or les scientifiques soupçonnent que leur fonte se produit par le dessous, au contact d’un océan dont la température n’excède pourtant pas quelques degrés. Des chercheurs du Laboratoire des écoulements géophysiques et industriels (LEGI, CNRS/Université Grenoble Alpes) et des universités de Göteborg (Suède), Bergen (Norvège), Kiel (Allemagne), Inha (Corée du Sud), Hobart (Australie) et Northumbrie (Royaume-Uni) ont démontré que le phénomène était régi par les différences de densité de l’eau de mer.

Ils ont pour cela utilisé la plateforme Coriolis du LEGI, une cuve tournante de treize mètres de diamètre où des plaques de plastique imitent les « iceshelves » et les canyons sous-marins qui contraignent les courants. De l’eau marquée par un colorant fluorescent a été injectée en dessous, tandis que les chercheurs modifient différents paramètres. Ils ont ainsi découvert le rôle de la densité de l’eau, un facteur principalement impacté par la salinité et la température. Si toute la colonne d’eau présente une densité uniforme, tout le courant est bloqué par le bord de la glace et contourne la plaque. Mais si la densité n’est pas partout la même, alors une partie du courant passe sous les « iceshelves » et provoque leur fonte. Ces résultats affinent les modèles de circulation océanique et aideront à mieux cibler les campagnes de mesures, dans le but de prédire les risques d’emballement de la fonte des glaces due au réchauffement climatique.

Un nouveau modèle pour prédire la fonte des glaces en Antarctique
© LEGI
Expérience reproduisant le courant antarctique circumpolaire pénétrant partiellement dans une cavité, via représentation simplifiée du relief sous-marin sous un iceshelf.

Référence

Ice front blocking of ocean heat transport to an Antarctic ice shelf, K. Wåhlin, N. Steiger, E. Darelius, K. M. Assmann, M. S. Glessmer, H. K. Ha, L. Herraiz-Borreguero, C. Heuzé, A. Jenkins, T. W. Kim, A. K. Mazur, J. Sommeria and S. Viboud
Nature, volume 578, pages 568–571 (2020)
doi.org/10.1038/s41586-020-2014-5

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Communication CNRS Ingénierie
Joël Sommeria-Klein
LEGI