Des nanosources de lumière commandées par la polarisation

Résultat scientifique Photonique

Grâce à une technique unique de photopolymérisation, un consortium international mené par des chercheurs du L2n a réalisé des nanosources optiques sensibles à la polarisation de la lumière excitatrice. Une voie nouvelle pour le développement de la nanophotonique, publiée dans la revue Nature Communications.

Pour réaliser des sources de lumière intégrables dans des dispositifs nanophotoniques, de nombreuses équipes de chercheurs travaillent sur des nanosources hybrides plasmoniques, basés sur le couplage et les transferts d'énergie entre des nanoparticules métalliques et des émetteurs quantiques (quantum dots). Mais un défi restait à relever : comment rendre ces sources sensibles à la polarisation de la lumière incidente, de manière à pouvoir contrôler à distance l'émission de ces nanosources hybrides ?

Jusqu'à présent, c'était impossible, car l'on ne parvenait pas à maîtriser la distribution spatiale des quantum dots dans le milieu contenant les nanoparticules métalliques. Or, pour que le dispositif soit sensible à la polarisation de la lumière excitatrice, il faut qu'il soit anisotrope à l'échelle nanométrique. Une équipe du laboratoire Lumière, nanomatériaux, nanotechnologies (L2n, CNRS/Université de Technologie de Troyes), avec un consortium international de laboratoires1 , a mis au point un procédé unique de photopolymérisation qui permet de contrôler la distribution spatiale à cette échelle.

Les chercheurs ont créé une formulation photochimique contenant des émetteurs quantiques (CdSe/CdS/Zn). Par ailleurs, ils ont fabriqué des nanoparticules d'or qui, lorsqu'elles sont éclairées par une lumière incidente, engendrent des sources lumineuses (plasmons de surface) nanométriques. En déposant une goutte de la formulation photochimique sur ces nanoparticules, puis en l'éclairant, il est ainsi possible de déclencher la polymérisation à des endroits contrôlés : la réaction de polymérisation est amorcée localement par le champ plasmonique des nanoparticules métalliques, permettant de piéger avec une précision nanométrique les émetteurs sur des sites stratégiques des particules, de façon anisotrope.

En réalisant plusieurs nano-émetteurs par ce procédé, les chercheurs ont montré que la photoluminescence obtenue dépendait fortement de la polarisation de la lumière incidente. Plusieurs régimes d'émission de lumière peuvent ainsi être commandés en modifiant la polarisation incidente.

En réduisant la concentration de quantum dots dans la formulation photochimique, les chercheurs sont parvenus à en piéger un seul au voisinage d'une nanoparticule d'or, faisant ainsi la démonstration du premier commutateur tout optique à photon unique commandé par la direction de la lumière incidente, ce qui répond à un fort enjeu pour le développement de la nanophotonique.

Les chercheurs ont travaillé avec des nanoparticules d'or de forme cubique, mais aussi avec des nano disques.  Ils explorent maintenant diverses formes de nanoparticules (bâtonnets, triangles...), et différents types de nanoémetteurs. L'objectif à terme est de disposer de nanosources de lumière ajustables en fonction des applications visées.

Illustration du recouvrement spatial entre le champ proche plasmonique et le milieu actif.
Illustration du recouvrement spatial entre le champ proche plasmonique et le milieu actif.
Image du centre : représentation de la nanosource hybride anisotrope (image réalisée à partir d'une image de microscopie électronique à balayage). L'or est représenté en gris foncé. Le milieu actif en polymère contenant des points quantiques émetteurs de lumière est représenté en rouge.
Image de gauche : nanosystème hybride éclairé avec une polarisation perpendiculaire au milieu actif. La nanosource est désactivée.
Image de droite : nanosystème hybride éclairé avec une polarisation parallèle au milieu actif. La nanosource est activée.
© Dr Tao XU

Références
Hybrid plasmonic nano-emitters with controlled single quantum emitter positioning on the local excitation field
D. Ge, S. Marguet, A. Issa, S. Jradi, T. Hoa Nguyen, M. Nahra,
J. Béal, R. Deturche, H. Chen, S. Blaize, J. Plain, C. Fiorini, L. Douillard, O. Soppera, X. Quyen Dinh, C. Dang, X. Yang, T. Xu, B. Wei, X. Wei Sun, C. Couteau & R. Bachelot
Nature Communications (2020) 11:3414
https://doi.org/10.1038/s41467-020-17248-8

  • 1Outre le L2n, ce consortium réunissait les laboratoires CINTRA (CNRS/Thales/Université Technologique de Nanyang), IS2M (CNRS/Université de Strasbourg), NIMBE (CNRS/CEA/Université Paris-Saclay) et SPEC (CNRS/CEA/Université Paris-Saclay), ainsi que des universités chinoises (SHU/UTSEUS, SUSTech) et singapourienne (NTU). La plupart de ces partenaires ont pu interagir dans le cadre des projets HAPPLE et Active-Nanophot, soutenus par l’ANR.

Contact

Communication CNRS Ingénierie
Renaud Bachelot
L2n