La rupture des matériaux observée à l'échelle de la microseconde

Résultat scientifique Matériaux et structures

Avec une caméra ultra-rapide à haute résolution, l'Institut de recherche en génie civil et mécanique étudie la propagation des fissures dans les matériaux à l'échelle du micron et de la microseconde. Cette précision inégalée ouvre des perspectives pour mieux comprendre la dynamique de la rupture, et améliorer la durabilité des matériaux.

Lorsqu'un matériau subit un choc, des fissures peuvent se former et se propager à grande vitesse, avec un risque d'endommagement majeur. Mieux comprendre ce phénomène permettrait de trouver des solutions pour améliorer la résistance des matériaux. Mais pour analyser finement la dynamique de la rupture, il faut pouvoir l'observer à l'échelle du micron et de la microseconde. C'est ce que permet la caméra ultra-rapide1 installée à  l'Institut de recherche en génie civil et mécanique (GeM, CNRS/Ecole Centrale Nantes/ Université de Nantes).

Cet instrument exceptionnel - il n'en existe que quelques exemplaires dans le monde - ouvre des perspectives nouvelles pour les chercheurs du GeM, en permettant d'observer un phénomène dynamique avec à la fois une grande vitesse d'acquisition (4 millions d'images/seconde) et une haute résolution (8 millions de pixels). Jusqu'à maintenant, la plupart des caméras ultra-rapides se contentent d'une résolution de quelques centaines de milliers de pixels.

Pour prendre en main la caméra, les chercheurs ont d'abord réalisé des essais de Kalthoff, déjà bien connus, qui consistent à observer l'effet d'un projectile sur une plaque comportant des entailles, afin d'observer la création des fissures, la formation de branchements dans leur propagation... La nouvelle caméra a permis d'enregistrer des données inédites sur ce type d'essais. Cette première phase leur a également permis d'acquérir le savoir-faire nécessaire pour valoriser les performances de l'instrument.

Plusieurs projets de recherche vont maintenant bénéficier de l'apport de la caméra ultra-rapide. Les chercheurs veulent par exemple l'utiliser pour étudier des matériaux dits « architecturés », des polymères (PMMA) qui comportent une structure quasi périodique susceptible « d'arrêter » la propagation de fissures, et donc d'améliorer la durabilité d'un matériau.  L'observation du comportement de matériaux métalliques à l'échelle du micron et de la microseconde est également au programme. La caméra ultra-rapide va aussi permettre d'approfondir les recherches sur les procédés de mise en forme à haute vitesse, notamment ceux reposant sur l'utilisation d'impulsions magnétiques intenses. Ces modes de fabrication ou de soudure innovants intéressent les industriels. Enfin, la modélisation de la rupture dynamique et du comportement à très haute vitesse de déformation est une thématique clé pour le laboratoire, et la caméra ultra-rapide permettra d'acquérir les données nécessaires à la validation des modèles.

champ de deplacement mesuré par corrélation d'imges numériques lors d'un essai d'impact asymmétrique dans de PMMA filmé à 480 000 im/s.
© GeM
Champ de déplacement mesuré par corrélation d'images numériques lors d'un essai d'impact asymétrique dans de PMMA filmé à 480 000 im/s.

Références :

Propriétés vibratoires :
Vibrational properties of quasi-periodic beam structures
A. Glacet, J. Réthoré, and A. Tanguy
Journal of Sound and Vibration, 442:624–644, 2019.
DOI: doi.org/10.1016/j.jsv.2018.10.045

Une piste d'utilisation des données tirées des images de la caméra pour étudier le comportement dynamique des matériaux :
Non-parametric material state field extraction from full field measurements
A. Leygue, R. Seghir, J. Réthoré, M. Coret, E. Verron, and L. Stainier
Computational Mechanics, 64(2):501–509, 2019.
DOI:
doi.org/10.1007/s00466-019-01725-z

  • 1Caméra acquise auprès de la société américaine Cordin, grâce à un cofinancement, dans le cadre du dispositif ConnectTalent, de Nantes Métropole, de la région des Pays de la Loire et du Fonds européen de développement régional (Feder).

Contact

Communication CNRS Ingénierie
Julien Réthoré
GeM