Maladies respiratoires : une avancée sur la compréhension du transport du mucus par les cils pulmonaires
De nombreuses maladies respiratoires sont liées à des problèmes de circulation et d’évacuation du mucus. Celui-ci se déplace à l’aide des cils microscopiques qui recouvrent les poumons, selon un mécanisme qu’il restait à élucider. Ces travaux interdisciplinaires montrent que l’hydrodynamique du mucus aide les cils à s’organiser de manière optimale pour le transporter en retour. Cette rétroaction pourrait ouvrir des pistes pour mieux diagnostiquer et traiter différentes pathologies respiratoires chroniques.
Essentiel à l’entretien des poumons, le mucus piège les poussières, germes et autres corps étrangers qui y entrent. Il circule grâce aux milliards de cils unicellulaires qui tapissent la paroi des poumons, avant d’être évacué des bronches en toussant ou en avalant. La manière dont les cils transportent le mucus est cependant encore mal connue, alors que les troubles de cette circulation provoquent, aggravent, ou sont causés par différentes maladies respiratoires comme la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), la mucoviscidose ou l’asthme sévère. Des pathologies si sérieuses qu’elles pourraient devenir la troisième cause de mortalité dans le monde, selon l’OMS, d’ici 2030. Une meilleure compréhension de ces mécanismes est donc essentielle pour trouver de nouveaux traitements. Des chercheurs et chercheuses du Centre interdisciplinaire de nanoscience de Marseille (CINaM, CNRS/AMU), du laboratoire de Mécanique, modélisation et procédés propres (M2P2, CNRS/Centrale Marseille/AMU), de l’Institut de Biologie du développement de Marseille (IBDM, CNRS/AMU), du Centre de recherche en CardioVasculaire et Nutrition (C2VN, AMU/Inserm/INRAE) et de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille (AP-HM) ont montré que l’hydrodynamique du mucus et le battement ciliaire sont liés : le mucus a besoin de battements réguliers et coordonnés des cils pour se déplacer, mais aussi que ceux-ci ne se synchronisent correctement qu’en présence de mucus.
Trois approches complémentaires ont été utilisées dans ces travaux. La reconstitution in vitro de l’épithélium des bronches a permis de mesurer à la fois le transport du mucus et les battements ciliaires. Un modèle numérique basé sur les équations de la mécanique des fluides en a été développé, et il a prédit que l’association entre l’organisation spatiale des cils et l’hydrodynamique du mucus entraîne différents types d’écoulements. Enfin, l’équipe a cartographié la polarité des cellules qui code l’orientation des cils sur l’ensemble du tissu pulmonaire. Les battements de cils s’alignent en présence du mucus et se désalignent lorsque celui-ci est retiré. C’est la force d’écoulement du mucus sur les cils qui détermine l’orientation de leurs battements et leur dynamique collective, et permet ainsi un transport plus efficace le long des bronches. Publiés dans la revue Nature Physics, ces résultats ouvrent la voie à une modélisation prédictive du transport du mucus dans les bronches chez les personnes saines et les patients atteints de maladies respiratoires chroniques. Les auteurs de ces travaux tentent à présent d’identifier, au niveau des cils comme du mucus, des biomarqueurs liés à ces pathologies.
Références
Active mucus–cilia hydrodynamic coupling drives self-organization of human bronchial epithelium.
É. Loiseau, S. Gsell, A. Nommick, C. Jomard, D. Gras, P. Chanez, U. D’Ortona, L. Kodjabachian, J. Favier, A. Viallat.
Nature Physics, Nature Publishing Group, 2020.
DOI: https://doi.org/10.1038/s41567-020-0980-z