Mieux comprendre les processus électrochimiques de la charge des supercondensateurs

Résultat scientifique Génie électrique et électronique

Dans les électrodes en carbone nanoporeux d'un supercondensateur, la désolvatation et le confinement des ions de l'électrolyte dans les pores sont des processus clés du cycle de charge et de décharge. Dans le cadre d’une collaboration entre une équipe du Laboratoire de mécanique et génie civil et le laboratoire Epigenetics, data, politics, une méthode de simulation a été développée permettant d'en élucider les mécanismes à l’échelle atomique, et de mieux comprendre leur influence sur les performances du supercondensateur.

Les performances des supercondensateurs, utilisés pour stocker de l'énergie, sont étroitement liées aux processus électrochimiques dans les électrodes en carbone nanoporeux : la désolvatation et le confinement des ions de l'électrolyte. Mais ces phénomènes sont difficiles à appréhender, car le carbone nanoporeux est un matériau complexe, avec des pores de tailles différentes et qui comporte des défauts chimiques et topologiques.

La nouvelle approche développée dans le cadre d'une collaboration entre le Laboratoire de mécanique et génie civil (LMGC, CNRS/université de Montpellier) et le laboratoire Epigenetics, data, politics ( EpiDaPo, CNRS-George Washington University) permet de prendre en compte le rôle de ces défauts dans les interactions des électrodes avec un électrolyte (une solution de chlorure de sodium). Les résultats sont publiés dans la revue PNAS.

Les chercheurs ont ainsi montré que, sous l'effet de la polarisation créée par une tension électrique appliquée entre les deux électrodes, les ions de l'électrolyte et les molécules d'eau s'adsorbent à la surface des électrodes ainsi que dans les pores sub-nanométriques. Avant de pénétrer dans les nanopores, les ions se déshydratent à la surface externe des électrodes. La simulation révèle un processus de désolvatation asymétrique des ions sodium et chlorure, dû au fait que les ions sodium sont en plus forte interaction avec leur sphère d'hydratation que les ions chlorure.

Dans un premier temps, les ions s'accumulent à la surface externe des électrodes. Dans un deuxième temps, les nanopores des électrodes se remplissent graduellement d'ions, en accord avec les expériences. Les ions dans les pores subnanométriques sont pour la plupart entièrement déshydratés et contribuent à hauteur de 20 % à la capacité électrochimique maximale (capacitance). Un tiers environ des ions restent irréversiblement piégés dans le cœur des électrodes pendant la décharge. In fine, l'étude montre que l'anode et la cathode n'ont pas la même capacité électrochimique (effet de capacitance asymétrique).

La méthode de simulation mise au point dans le cadre de ce travail est plus simple à mettre en œuvre que les techniques utilisées jusqu'ici, et plus rapide. Elle devrait par conséquent ouvrir la voie à des études détaillées des processus électrochimiques. Parmi les pistes de recherche, l'influence du piégeage des ions sur une éventuelle réduction de la capacité de stockage au cours des cycles de charge/décharge, ou encore des études de durabilité.

Adsorption ionique dans des électrodes polarisées simulée par différentes méthodes de polarisation : (a) méthode des charges constantes, (b) méthode de la tension constante et (c) méthode des charges constantes localisées sur les défauts des électrodes, telle que développée dans cette étude. Cette dernière méthode permet d'observer à la fois une adsorption superficielle et une adsorption interne, en accord avec les observations expérimentales. On peut également observer une adsorption asymétrique des ions due au fait que les ions sodium (en bleu) sont plus fermement retenus par leur sphère d'hydratation que les ions chlorure (en orange). © LMGC/PNAS
Adsorption ionique dans des électrodes polarisées simulée par différentes méthodes de polarisation : (a) méthode des charges constantes, (b) méthode de la tension constante et (c) méthode des charges constantes localisées sur les défauts des électrodes, telle que développée dans cette étude. Cette dernière méthode permet d'observer à la fois une adsorption superficielle et une adsorption interne, en accord avec les observations expérimentales. On peut également observer une adsorption asymétrique des ions due au fait que les ions sodium (en bleu) sont plus fermement retenus par leur sphère d'hydratation que les ions chlorure (en orange).
© LMGC/PNAS

Références :

How chemical defects influence the charging of nanoporous carbon supercapacitors?
Romain Dupuis, Pierre-Louis Valdenaire, Roland J.-M. Pellenq, and Katerina Ioannidou.
PNAS

https://doi.org/10.1073/pnas.2121945119

Contact

Katerina Ioannidou
Chargée de recherche CNRS au Laboratoire de mécanique et génie civil (LMGC, CNRS/Université de Montpellier)
Communication CNRS Ingénierie