Plusieurs mécanismes de neutralisation des nanoparticules découverts dans les cellules pulmonaires
Comment l’organisme réagit-il en cas d’inhalation de nanoparticules ? Des scientifiques ont étudié l’évolution de nanofeuillets de disulfure de molybdène dans des poumons de souris jusqu’à un mois après leur inhalation. Publiés dans la revue Advanced Materials, ces travaux montrent que les macrophages pulmonaires peuvent transformer ces nanoparticules et les enrouler afin de réduire leur surface de contact, et donc leur toxicité, et seraient également capables de moduler la réaction inflammatoire induite.
Le devenir des nanoparticules dans l’environnement biologique fait l’objet d’une importante surveillance. L’évaluation de leur toxicité dans le corps humain demande ainsi de comprendre les réactions inflammatoires qu’elles peuvent provoquer. Parmi les nanoparticules d’intérêt, le disulfure de molybdène (MoS2) est un analogue du graphène très utilisé par l’industrie, notamment comme lubrifiant mécanique, qui peut être inhalé involontairement. Des chercheuses et chercheurs des laboratoires Matière et systèmes complexes (MSC, CNRS/Université Paris Cité), Matériaux et phénomènes quantiques (MPQ, CNRS/Université Paris Cité), Immunologie, immunopathologie et chimie thérapeutique (I2CT, CNRS) et de l’Institut Galien Paris-Saclay (IGPS, CNRS/Université Paris-Saclay) ont étudié la persistance à long terme de nanofeuillets de MoS2 dans les poumons de souris qui y ont été exposées. Ils ont ainsi scruté les transformations de ces nanoparticules tout en suivant différents biomarqueurs de l’inflammation dans les poumons.
Pour cela, les scientifiques ont multiplié les observations par microscopie électronique dans des échantillons biologiques issus de poumons, à différents temps tandis que des lavages broncho-alvéolaires étaient réalisés successivement jusqu’à un mois après l’exposition au MoS2. En parallèle, ils ont observé en temps réel la dynamique de transformation des nanofeuillets, dans un modèle de milieu cellulaire, grâce à une technique innovante de microscopie électronique en milieu liquide. Publiés dans la revue Advanced Materials, il en ressort que les cellules, en particulier les macrophages pulmonaires, sont capables d’oxyder et de dissoudre ces nanoparticules, les rendant ainsi probablement moins toxiques. Un mécanisme d’enroulement des nanofeuillets sur eux-mêmes a été mis en évidence, qui diminue leur surface capable de réagir de façon néfaste avec les cellules. Le second résultat important met en jeu les nanovésicules membranaires, également appelées vésicules extracellulaires, que les cellules sont capables d’émettre dans le milieu extracellulaire pour communiquer entre elles. Les vésicules extracellulaires isolées des liquides broncho-alvéolaires des souris exposées au MoS2 réduisent l’expression de signaux d’inflammation chez les cellules immunitaires, et ce davantage que celles des souris non exposées. Cela pourrait signifier que ces vésicules transportent différents régulateurs de l’inflammation et évacuent les déchets des nanoparticules vers l’extérieur des cellules. Forts de ces résultats, les équipes souhaitent approfondir ces travaux et les élargir à d’autres organes et à d’autres nanoparticules, comme le dioxyde de titane.
Références
Resolution of MoS2 nanosheets-induced pulmonary inflammation driven by nanoscale intracellular transformation and extracellular-vesicle shuttles.
Nathaly Ortiz Peña, Kondareddy Cherukula, Benjamin Even, Ding-Kun Ji, Sarah Razafindrakoto, Shiyuan Peng, Amanda K. A. Silva, Cécilia Ménard Moyon, Hervé Hillaireau, Alberto Bianco, Elias Fattal, Damien Alloyeau, Florence Gazeau.
Advanced Materials, 2023.
https://doi.org/10.1002/adma.202209615