Mesurer in vitro et in vivo les propriétés mécaniques du tissu musculo-tendineux
En utilisant les techniques d'AFM (microscopie à force atomique) et d'élastographie par ultrasons, une équipe du laboratoire Biomécanique et bioingénierie propose des méthodologies expérimentales innovantes qui permettent de caractériser les propriétés mécaniques des tissus musculo-tendineux. Les résultats sont publiés dans Nature Scientific Reports.
Faire le lien entre les propriétés biologiques des tissus et leurs caractéristiques mécaniques permet de mieux comprendre leur comportement. C'est pour faire progresser ce type de recherche qu'une équipe du laboratoire Biomécanique et bioingénierie (BMBI, CNRS/UTC/Sorbonne Universités), en collaboration avec la Mayo Clinic (Rochester, États-Unis) a développé une approche multiphysique pour caractériser les propriétés mécaniques du tissu musculo-tendineux. Les chercheurs ont mis au point une méthodologie inédite qui s'appuie sur deux techniques de mesure : la microscopie à force atomique (AFM) et l'élastographie par ultrasons.
Ces nouveaux protocoles expérimentaux ont été appliqués à l'étude d'une souris dépourvue du gène TIEG11
, gène qui joue un rôle essentiel dans le développement du système musculo-squelettique. Il s'agissait alors d'évaluer les changements des propriétés mécaniques au sein des muscles et des tendons de ces souris.
La microscopie à force atomique mesure, par indentation du tissu prélevé, l'élasticité transversale de fibres musculaires ou tendineuses. Le nouveau protocole s'affranchit de l'usage de colle ou de résine pour fixer les fibres étudiées, ce qui garantit une plus grande fiabilité des mesures. Un système d'acquisition rapide permet d'établir une cartographie de l'élasticité de la fibre, que l'on peut alors mettre en rapport avec sa structure et ses composants.
L'élastographie par ultrasons a l'avantage de pouvoir être pratiquée sur les animaux vivants. Les chercheurs du BMBI ont pour la première fois mesuré in vivo des valeurs d'élasticité sur les fibres musculaires et tendineuses de ces souris. Des modifications de l'élasticité (variations du module d'Young) des fibres ont été mises en évidence chez la souris privée du gène TIEG1.
Ces nouveaux protocoles de mesure permettront de suivre l'effet de traitements thérapeutiques, et d'étudier le lien entre les variations des propriétés mécaniques des fibres et certaines pathologies musculaires. Par ailleurs, les chercheurs du BMBI veulent élargir les possibilités de leurs nouveaux protocoles expérimentaux. Les mesures de l'élasticité transversale par AFM pourraient être pratiquées sur des fibres en conditions actives – par exemple sur des fibres étirées. Enfin les méthodologies développées peuvent être adaptées à l'étude d'autres tissus.
Références :
Development of a novel multiphysical approach for the characterization of mechanical properties of musculotendinous tissues,
M. Kammoun, R. Ternifi, V. Dupres, P. Pouletaut, S. Même, W. Même, F. Szeremeta, J. Landoulsi, J.-M. Constans, F. Lafont, M. Subramaniam, J. R. Hawse & S. F. Bensamoun
Nature Scientific Reports, 9, 7733 (2019)
DOI: 10.1038/s41598-019-44053-1
- 1Le gène TIEG1 (Transforming growth factor-beta (TGF-ß) Inducible Early Gene-1) a été découvert à la Mayo Clinic (Rochester, MN, États-Unis). Il joue un rôle essentiel dans le métabolisme musculaire et le développement du système musculo-squelettique. Les souris chez lesquelles on a invalidé ce gène présentent des muscles hypertrophiés, dont la structure est désorganisée, et un phénotype de myopathie mitochondriale (dysfonctionnement du métabolisme énergétique). Ce gène est associé à de multiples pathologies humaines telles que l’ostéoporose et la cardiomyopathie.