À l’écoute de l’énergie des éclairs
Chacun sait que compter les secondes entre l’apparition d’un éclair et l’arrivée du tonnerre donne la distance à laquelle tombe la foudre. Des chercheurs de l’Institut Jean Le Rond d’Alembert et du CEA ont montré que ce son permet également d’estimer l’énergie d’un éclair. Dans ces travaux publiés dans Geophysical Research Letters, les scientifiques déduisent la géométrie des éclairs grâce à un réseau de micros, puis en calculent l’énergie.
Les éclairs rééquilibrent la charge électrostatique entre deux nuages, ou entre un nuage et le sol. Cette décharge électrostatique augmente localement la température de plusieurs dizaines de milliers de degrés, provoquant une onde de choc qui se propage dans l’atmosphère : le tonnerre. Si l’on sait utiliser ce son pour estimer la distance à laquelle un éclair a frappé, des chercheurs de l’Institut Jean Le Rond d’Alembert (CNRS/Sorbonne Université) et du CEA sont parvenus à s’en servir pour mesurer la puissance de l’éclair. Un paramètre qui souffre d’une incertitude allant jusqu’à trois ordres de grandeur.
L’équipe a pour cela utilisé les données mesurées en 2012 dans le cadre du projet européen HyMeX, qui étudie le climat méditerranéen. Quatre microphones ont enregistré pendant deux mois, et en continu, le son émanant du ciel des Cévennes, une région particulièrement frappée par les orages. Ces enregistrements ont d’abord servi à reconstruire la géométrie des éclairs, en prouvant la corrélation entre la localisation des sources acoustiques et électromagnétiques. Puis, les chercheurs les ont à nouveau utilisés pour isoler, au sein du tonnerre, le signal acoustique provenant de certaines de ses branches, notamment le canal principal qui connecte le nuage orageux et le sol. Or on peut calculer le tonnerre d’un éclair à partir de sa géométrie et de son énergie. Les chercheurs ont alors comparé les tonnerres recueillis sur le terrain à une banque de données de tonnerres simulés issue de 72 éclairs virtuels, statistiquement conformes aux vrais éclairs. Cela a montré que les mesures acoustiques donnent de très bons résultats pour estimer l’énergie des éclairs à polarité négative, qui représentent 90 % des décharges sol-nuage, et ce à une distance comprise entre trois et douze kilomètres des micros.
Références :
Acoustical energy of return strokes: a comparison between a statistical model and measurements,
Lacroix, F. Coulouvrat, R. Marchiano, Th. Farges, J.-F. Ripoll
Geophysical Research Letters (octobre 2019)
DOI: https://doi.org/10.1029/2019GL085369