Des puits quantiques pour refroidir les circuits intégrés
En appliquant une tension électrique sur une structure de puits quantique, une équipe franco-japonaise a montré que l'on pourrait refroidir efficacement un circuit intégré, et limiter ainsi l'échauffement qui pénalise ses performances et sa durée de vie. Ces résultats, obtenus par des chercheurs du LIMMS, sont publiés dans la revue Nature Communications.
Toujours plus denses et plus rapides, les circuits intégrés produisent aussi toujours plus de chaleur. La densité de puissance sur une puce peut atteindre 100 W.cm-2, et la température peut y dépasser 400 K (167°C). Réduire cet échauffement, qui nuit aux performances et à la durée de vie du composant, est devenu un enjeu majeur pour les fabricants de semiconducteurs. Des chercheurs de l'unité mixte internationale LIMMS (Laboratory for Integrated Micro Mechatronics Systems, CNRS/Université de Tokyo) proposent une piste innovante pour refroidir les puces électroniques, fondée sur des structures de puits quantiques.
L'équipe franco-japonaise a montré qu'en appliquant une tension à un puits quantique, une structure nanométrique capable de piéger des électrons, ces derniers peuvent être refroidis. Ces puits quantiques, intégrés à un circuit via les procédés conventionnels de fabrication de semiconducteurs, pourraient ainsi refroidir directement les «points chauds» sur les puces électroniques. Une solution plus efficace que les systèmes actuels, par ventilateur ou circulation d'eau, très consommateurs d'énergie.
Le type de puits quantique utilisé dans cette recherche est appelé hétéro-structure asymétrique à double barrière. Dans ces dispositifs, des puits d'arséniure de gallium très minces (4 nm) sont séparés par des couches d'arséniure d'aluminium et de gallium. Lorsque la tension appliquée est égale à l’énergie du niveau quantique à l’intérieur du puits, les électrons peuvent traverser facilement la première barrière par effet tunnel résonnant. Cependant, seuls les électrons ayant une énergie cinétique élevée pourront continuer au-delà de la deuxième barrière. Les électrons plus rapides, donc "plus chauds", s'échappent, alors que les électrons lents, "plus froids", sont piégés : le dispositif refroidit. Ce phénomène avait déjà été mis en évidence dans d'autres matériaux, notamment des supraconducteurs. L'équipe du LIMMS a pour la première fois démontré son existence dans des semiconducteurs, d'abord par des calculs théoriques, puis expérimentalement.
Aujourd'hui, les chercheurs continuent d'explorer ce phénomène, et vont ensuite étudier comment le refroidissement électronique produit à son tour une baisse de température dans le réseau cristallin du semiconducteur, baisse qui pourrait atteindre 10 à 15 K. A plus long terme, l'objectif est d'intégrer ce type de dispositif dans des puces, en collaboration avec un industriel des semiconducteurs.
Références :
Evaporative electron cooling in asymmetric double barrier semiconductor heterostructures,
A. Yangui, M. Bescond, T. Yan, N. Nagai, and K. Hirakawa
Nature Communications 10, 4504 (2019)
DOI: 10.1038/s41467-019-12488-9