Une méthode d’étude des nanoparticules et des virus adaptée au haut confinement biologique
L’analyse des matériaux se fait parfois dans des conditions qui excluent les techniques classiques. Des chercheurs et chercheuses de l'Institut XLIM, proposent une nouvelle méthode d’holographie optique qui, sans contact ni marqueurs fluorescents, mesure la concentration et identifie tous types de nanoparticules et de virus. Parus dans la revue Small, ces travaux, testés avec succès dans un laboratoire biologique de haut confinement, pourraient servir à la détection et à l’étude de virus émergents.
Dans de petits échantillons liquides, la détection et l’identification de nanoparticules et de virus passent souvent par des méthodes basées sur leur modification par marquage fluorescent. Ces marqueurs sont spécifiques à chaque type de particule, ce qui suppose que l’on ait déjà une certaine idée du contenu. Cette approche implique également une manipulation supplémentaire des échantillons pas toujours possible, en particulier dans le cas de virus émergents encore peu connus, et dans les laboratoires de biologie à haut niveau de confinement. Des chercheurs et chercheuses de l'Institut XLIM (CNRS/Université de Limoges), de l’Institut de recherche en infectiologie de Montpellier (IRIM, CNRS/Université de Montpellier), du laboratoire Photonique numérique & nanosciences (LP2N, CNRS/Institut d’optique graduate school/Université de Bordeaux) et du Centre d’études des maladies infectieuses et pharmacologie anti-infectieuse (CEMIPAI, CNRS/Université de Montpellier) ont développé une méthode optique ultrasensible, non invasive et rapide, capable de détecter, d’identifier ainsi que de mesurer la taille et la concentration de particules de nanoplastique, de nanométal et de virus infectieux comme le VIH ou le SARS-CoV-2, sans connaissance a priori sur le contenu de l’échantillon. Le système est compact et quasiment insensible aux sources externes de bruit, tels que la lumière parasite et les vibrations, pour permettre une utilisation directement dans un poste de sécurité microbiologique.
Ces travaux interdisciplinaires revisitent l’holographie optique, un procédé mesurant la phase et l’intensité de la lumière qui passe à travers l’échantillon. Concrètement, elle mesure par interférométrie le retard et l’atténuation, par la matière étudiée, d’un flux de photons. La méthode reconstruit en 2D les changements de phase et de l’atténuation accumulés au travers de l’échantillon. Au lieu d’utiliser un montage classique d’holographie optique, très sensible aux vibrations, les scientifiques ont utilisé un système compact et ultrasensible sous la forme d’une caméra modifiée, capturant l’information des nano-objets sur une très grande profondeur de champ. Cette unique acquisition 2D permet une reconstruction du volume complet de l’échantillon et d’y inférer la position 3D et le signal précis de chaque particule. Des algorithmes d’apprentissage automatique parviennent ensuite, après entraînement, à identifier tous les matériaux et virus auxquels ils ont déjà été confrontés. La méthode a été testée avec succès au sein d’un poste de sécurité microbiologique d’un laboratoire biologique de haut confinement de type L3, sans perte de sensibilité et en toute sécurité, sur des échantillons non modifiés de seulement 10 microlitres. Ces travaux ont donné lieu à un dépôt de brevet avec l’entreprise française Myriade, qui valorise déjà des technologies issues de laboratoires CNRS. L’équipe cherche à présent à détecter des éléments encore plus petits, de quelques nanomètres, et complète la liste des nano-objets que les algorithmes parviennent à reconnaître.
Ces travaux ont notamment été financés par le biais d’une bourse ERC Starting Grant, dans le cadre du projet SPECIPHIC - Label-free quantitative nanoscopy for molecular specific identification at depth in pristine living biological tissues.
Références
Label-free single nanoparticle identification and characterization in demanding environment, including infectious emergent virus.
Minh-Chau Nguyen, Peter Bonnaud, Rayane Dibsy, Guillaume Maucort, Sébastien Lyonnais, Delphine Muriaux, Pierre Bon.
Small, 2023.
https://doi.org/10.1002/smll.202304564
Article consultable sur la base d’archives ouvertes Arxiv